A l’occasion des Jeux Olympiques de l’été 2024, les conservateurs-restaurateurs, les musées et le patrimoine se sont mis au sport ! Les JO à Paris et en France ont, en effet, été à l’origine de plusieurs projets et chantiers de conservation-restauration dans le cadre d’expositions temporaires dédiées à la thématique du sport ou dans le but de restaurer certains monuments de la capitale accueillant les Jeux.
Par Lisa-Clémentine Guillou, conservatrice-restauratrice d’objets en bois et Emilie Dominey, conservatrice-restauratrice de sculptures pour la Fédération Française des Conservateurs-restaurateurs – FFCR, membre de l’UNAPL.
La Conservation-Restauration au service du patrimoine monumental et sportif
Le patrimoine bâti de Paris, écrin des JO
Les Jeux Olympiques de 2024 ont dans un premier temps été initiateurs de chantiers de conservation-restauration monumentaux afin d’offrir un écrin à cet évènement mondial organisé en France.
Ainsi, la ville de Paris et son service de conservation des œuvres d’art civiles et religieuses ont lancé des chantiers phares, en amont des Jeux, tels que la restauration des fontaines de la place de la Concorde, l’un des points névralgiques des Jeux olympiques, étant le site de plusieurs épreuves en plein centre de Paris.
Ces fontaines en fonte de fer datent de la transformation de la place au milieu du 19ème siècle et ont été conçues par l’architecte Jacques-Ignace Hittorff.
Elles ont été restaurées pendant plusieurs mois par les équipes de conservateurs-restaurateurs diplômés de Béatrice Dubarry, Sarah Gonnet et Laura Caru, pour la Fontaine des Fleuves et de Bruno Perdu, pour la Fontaine des Mers.

Suite au constat d’état détaillant les altérations des fontaines, les sculptures et vasques en fonte ainsi que le bassin en pierre qui les composent ont été nettoyées par micro-sablage, protégées par l’application d’une couche primaire contre la corrosion du métal, peintes et dorées afin de leur redonner les couleurs vives et l’éclat qui les caractérisent.

Ces chantiers monumentaux sont souvent l’occasion de réunir, sur le long terme, des professionnels aux spécialités variées et travaillant sur divers types de matériaux.
Ici des conservateurs-restaurateurs spécialisés dans le traitement des sculptures en pierre et dans la restauration du patrimoine métallique ont collaboré ensemble, ainsi qu’avec divers corps de métier tels que des doreurs et des patineurs de bronzes d’art.

Dans le cadre des Jeux Olympiques, d’autres chantiers emblématiques ont eu lieu à Paris, tels que la restauration du Pont d’Iéna et de ses sculptures, réalisée par le groupement de Claire Dard, conservatrice-restauratrice de sculptures.

Le patrimoine culturel sportif, porteur d’une histoire du sport
L’accueil des Jeux Olympiques en France a également été l’occasion de traiter et mettre en valeur tout un ensemble d’objets culturels, appartenant plus largement au patrimoine du sport, allant des objets mobiliers aux objets textiles, ayant pour la plupart une dimension plus utilitaire.
Ce patrimoine sportif matériel, nouvellement reconnu, est constitué du matériel sportif des athlètes à travers l’histoire mais également d’objets plus symboliques tels que les médailles et trophées.
Les typologies et matériaux en présence sont donc nombreux : bois, métaux, plastiques, textiles… et regroupent toutes les spécialités de la conservation-restauration du patrimoine culturel.

Ainsi au printemps 2024, onze cycles issus des collections du musée départemental de Sceaux ont été restaurés par le groupement d’Emilie Rouquié, conservatrice-restauratrice de patrimoine métallique.
Entre autres, les conservatrices-restauratrices de l’équipe ont traité des modèles de draisienne comme la draisienne « 64.24.2 », restaurée pour la partie bois par Lisa-Clémentine Guillou, conservatrice-restauratrice d’objets en bois.
Ce système à deux roues sans pédales est mis au point en 1817 par Karl Drais von Sauerbronn et rentre dans le langage courant d’après le nom de son inventeur.
La draisienne « 64.24.2 » est réalisée en bois de châtaigner, les roues sont cerclées de métal et la selle est en cuir. Elle date d’entre 1818 et 1830 et aurait été fabriquée artisanalement d’après modèle.
Objet rare, elle provient de la collection léguée au domaine de Sceaux par le génial aviateur Robert Grandseigne (1885-1961). Cet objet a reçu un traitement de restauration fondamentale qui a permis de stabiliser la structure et de rendre toute sa lisibilité à l’objet.


Plusieurs compétences et professionnelles de la conservation-restauration ont été nécessaires pour aboutir la restauration : Camille Alembik s’est attelée au nettoyage et aux consolidations structurelles du cuir de la selle, Julia Jouet à la stabilisation des cerclages et éléments métalliques et Elena Joulin au nettoyage du vernis.


La draisienne a été présentée en fin d’année dernière dans l’exposition très didactique « Roues Libres. La grande histoire du vélo » qui s’est tenue jusqu’au 31 décembre 2024 dans l’Orangerie du Musée Départemental du domaine de Sceaux.
Cette exposition s’illustre également aujourd’hui à travers un fantastique catalogue d’exposition édité sous la direction scientifique de la conservatrice Céline Barbin qui documente l’histoire et les techniques de restauration de ces objets beaux et accessibles à tous.

L’effervescence liée aux Jeux Olympiques de 2024 a permis de mettre en valeur un ensemble d’objets et d’œuvres liés au sport, auxquels sont attribués depuis plusieurs années une dimension culturelle et patrimoniale forte, au travers d’expositions telles que celle qui fut organisée à l’Orangerie de Sceaux.
Ces évènements culturels ont ainsi engendré la restauration de typologies d’objets et de matériaux très variés. Les projets de conservation-restauration ont également été l’occasion d’une étude plus approfondie de l’histoire, des matériaux et des techniques de mise en œuvre sur des objets moins mis en lumière.
Enfin, en tant que ville d’accueil des Jeux Olympiques, Paris a également connu, en amont, une période importante de travaux de conservation-restauration, qui a permis la mise en place de chantiers monumentaux et multidisciplinaires.
Cet évènement olympique et international a donc été l’occasion de mettre le patrimoine, dans toutes ces dimensions, au-devant de la scène et d’impliquer les métiers de la conservation-restauration.
Lisa-Clémentine Guillou, conservatrice-restauratrice d’objets en bois
Emilie Dominey, conservatrice-restauratrice de sculptures
pour la Fédération Française des Conservateurs-restaurateurs – FFCR, membre de l’UNAPL.